MATANews #1

Ecrit par Séverine Poirier Pouit dite Matana

8 novembre 2021

 L’invité Christian Grisinger

Il y a plusieurs années je disais « un jour je ferai des sculptures métal ». Je pense que je ne l’aurais jamais fait si la vie ne m’avait pas mis en état d’urgence, celui  qui vous pousse à réaliser vos rêves et vos envies…
 
J’ai eu l’immense chance de rencontrer Christian Grisinger qui est devenu « une sorte » de Maître pour moi. J’écris « une sorte » non pas d’une manière péjorative. Bien au contraire, j’ai eu la chance d’apprendre la technique pour aller dans la réalisation de sculptures à l’image des mes idées. Christian n’impose rien, il accompagne, observe, s’interroge, interroge.
Je le remercie pour ce qu’il a fait pour moi mais aussi pour tout ce qu’il fait au quotidien pour les autres…
Séverine Poirier Pouit

Petit, Christian était un hyper-actif, il n’aimait pas l’école, n’y trouvait aucun intérêt. Il en sourit aujourd’hui quand il indique que son premier conseil de discipline a eu lieu… en Maternelle.
C’est une magnifique rencontre avec un professeur de Dessin qui repére les esquisses de Christian qui bouleverse cette spirale. Il prend des cours de soutien, de rattrapage et affine encore et encore le trait…
Ensuite, il ose et réussit le concours à l’Ecole Boulle où il choisit la spécialité : Ebénisterie.
Il aime ce qui détonne, le non-conventionnel et le politiquement non correct afin de bousculer les esprits. Faire voir autrement transformer l’impossible en POSSIBLE. Cette idéologie il la cherche et l’applique.
Indépendamment de ses 6 années de formation… il cherche ailleurs, autrement et il trouve…
Il aime le mobilier italien, Memphis remporte ses faveurs. Lorsqu’il créée il met en oeuvre toute son imagination au service à la fois de l’idée mais aussi du rationnel/fonctionnel et de l’esthétique. Ses petits clins d’oeil au XVIIIème siècle qu’il réinterprête, se retrouvent en petites touches sur son mobilier (coulée de boutons de bronze…formes nouvelles).
Rapidement le métal l’attire dans la création de mobilier, il répond à ses exigences. En effet la création en métal exige une notion de rapidité et d’urgence dans la réalisation. Cette notion est très importante pour lui et lui convient parfaitement.
A ses débuts en sculpture il est tout de suite attiré par l’abstrait. C’est avec émotion qu’il parle des oeuvres de Gabo ou encore Malevitch.
La représentation de l’idée et de son contenu est plus importante pour lui que la fonction, l’utilité matériel.
Il est inspiré également par des artistes comme Anselm Kieffer. Comme lui, il aime aussi travailler sur la mémoire. Les mémoires sombres sont aussi mises en avant dans son travail notamment avec le travail sur le plomb, représentant la blessure, la souffrance.
Christian Grisinger a travaillé entre autre sur la mémoire de l’Arbre. Il a dans certaines oeuvres enveloppés des arbres de plomb laissant ses totems entre les mains de Dame Nature. De noir, l’oeuvre passe au blanc…avec le temps, le temps…
Le travail sur la mémoire, et la transmission sont deux pôles très importants pour lui. L’Art doit oeuvrer et l’Humain est au coeur du travail de Christian Grisinger.
 
 
Il aime les gens généreux et il éprouve une joie à dire qu’il en a beaucoup rencontrés et que la chance l’accompagne. A ses débuts dans la vie active, un, en particulier a marqué sa mémoire et il lui voue un infini respect. C’est Serge Binotto.
 
Christian travaillait comme professeur à l’ENSCI ( l’Ecole Nationale Supérieure des Créations Industrielles) c’est là qu’ils se sont rencontrés. La simplicité de Serge Binotto, sa justesse dans sa façon de voir la vie l’ont beaucoup marqué. Son livre « De l’établi à l’architecture avec Jean Prouvé » (Ed.du Linteau) est une pépite.
 
Par la suite Christian évolue dans le milieu du Théatre. En parallèle, il aide dans les bidonvilles « Roms » au côté d’ associations. Il est dans l’action.
 
 
Depuis des années il travaille à l’association INITIATIVES SOLIDAIRES à Aubervilliers.
Là encore c’est la transmission pour remettre les gens sur les rails de la vie. Des migrants, sans distinction d’origine ni de sexe sont formés au travail du bois, du métal et du verre. Le tout est fait de récupération.
Les réalisations de mobiliers sont rapidement remarquées par leur qualité et leur esthétisme contemporain.
De grandes entreprises françaises leur passent souvent commandes ainsi que des institutions telles que la Ville de Paris ou le conseil Départemental, Airbus…
Depuis peu, il vient de s’installer dans le sud du côté de Montpellier où il est en train de monter de nouveaux ateliers de formation pour les personnes désireuses d’apprendre au travers de stage le travail du métal. Ces stages sont plus destinés à des réorientations de vie (hommes ou femmes).
Photographies :
Crédits photographiques : @Jean-Jacques Tripier, Jacques Guezou, Afrouz Razavi
Extraits photographiques du livre les Années Montreuil Grisinger Sculpteur (Grisinger & Folies d’encre édition)
« Les années Montreuil – Grisinger sculpteur » Ed Grisinger et Folies d’encre
présente le travail de cet artiste contemporain définitivement Humain.
Un peu de fer, un peu de bois, un peu de corde, un peu de plomb, un corps en extension qui apparaît, Christian Grisinger a posé son oeuvre-là, à Montreuil. Il a pensé et fabriqué ces formes et ces ombres à Montreuil. L’humanité est là aussi, dans ces matières…N’est elle pas même plus présente dans ce bois trodu ou de clou fiché ou cette corde tortillée ou ce creux d’un siège que dans le buste étiré et figé ?
Peu de mots peu de discours mais avec Christian chaque mot, chaque idée se plante là, c’est un clou qui se plante droit, sans se tourner ni se vriller ni contourner ni justifier. C’est comme ça. Tête de bois, homme de fer, liens noués, enroulés, ici et maintenant. C’est Christian Grisinger.
Claire Bidart

Préface

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